« La Présidence sous influence : que dit la ruée récente de l’exécutif français sur les​ influenceurs ? », par Florent Dubos et Laurent Foisset

Le phénomène souligne​​ l’intérêt croissant pour des collaborations avec les influenceurs qui semblent devenir incontournables, non seulement pour gagner en visibilité mais aussi et surtout pour bénéficier de l’engagement de leurs communautés.

Depuis le début de l’année le gouvernement multiplie les collaborations avec les influenceurs français, Enjoy Phoenix, Lena Situations et, dernièrement, McFly et Carlito défiés par Emmanuel Macron lui-même. Ces opérations déclenchent les cris d’orfraie des commentateurs du sérail qui y voient un dévoiement de la communication politique.
Mais ces protestations ressemblent à s’y méprendre à celles qui ont accompagnées l’avènement de la « politique spectacle » à la télévision au siècle dernier. Chaque époque a ses polémiques.

Bienvenue dans un monde post-publicitaire

Si la sphère politique s’y intéresse, ce n’est donc pas simplement pour toucher les jeunes comme cela est trop souvent résumé.

L’audience des influenceurs est bien plus large (même si le cœur de cible est là) et surtout le format permet de développer un discours pédagogique qui sort des codes publicitaires.
Car dans ces opérations, l’enjeu est bien de s’extraire des codes publicitaires pour embrasser des formats différents qui permettent une élaboration des discours.
Cela peut sembler paradoxal mais l’influence est devenue le lieu où l’on peut pousser plus loin la pédagogie pour un nouveau produit ou service, ou encore mieux pour sensibiliser à une cause, comme McFly et Carlito l’ont fait pour promouvoir les gestes barrières.

À côté des grandes campagnes classiques de sensibilisation, il y a désormais la place pour des dispositifs qui intègrent le monde post-publicitaire dans lequel nous sommes entrés.
Ad blockers, domination de plateformes d’entertainement dépourvues de publicité (Netflix, AmazonPrimeVidéo, Disney+, …)​, à mesure que l’univers se digitalise, il offre de moins en moins de surfaces d’exposition à la publicité, de moins en moins d’attention, également. Difficile en effet de faire passer un message construit sur une simple bannière mobile et pour quel impact ? L’avenir est donc au recours à des formats digitaux éditoriaux et non publicitaires pour s’assurer de la diffusion des messages, et surtout de leur compréhension.

Les superpouvoirs de YouTube

Si Instagram demeure la plateforme star de l’influence, YouTube occupe une place privilégiée dans ce panorama car elle dispose d’atouts particuliers. YouTube est le deuxième moteur de recherche en France, c’est-à-dire qu’il est en prise directe avec les requêtes des internautes et en fait en plus un vrai outil d’analyse de tendances.
Ensuite, son audience est puissante : il talonne le leader du marché Facebook, avec 42 millions d’utilisateurs mensuels (dont 15 millions regardent les vidéos sur leur TV). En outre, les contenus proposés par la plateforme ont une durée de vie nettement plus élevée que les autres réseaux sociaux (quelques minutes pour Twitter, quelques heures pour Facebook/Instagram, 24 heures pour LinkedIn et 20 jours pour YouTube).

Enfin, on remarque que la durée de visionnage (et donc d’exposition de la marque) des vidéos est sans commune mesure avec les formats publicitaires classiques (7 à 8 minutes en moyenne pour une vidéo de 12 minutes). Le superpouvoir de Youtube, c’est d’offrir une possibilité d’influence durable.

Sans présager de l’avenir, il est clair que les collaborations gouvernementales sur YouTube seront toujours en ligne dans un an, et joueront certainement un rôle au moment crucial de l’élection présidentielle.

Pour une fois, les marques devraient se tourner vers les stratégies de communications politiques, pour tirer parti, elles aussi, des superpouvoirs de YouTube.

Cet article a été initialement publié sur www.ladn.eu

Par Florent Dubos, Partner d’Antidox et cofondateur de superworks.fr, et Laurent Foisset, fondateur de Monolith Partners