« Elon Musk défie Vladimir Poutine sur Twitter » par Benjamin Guerin

Habitué des polémiques et possédant un rapport très singulier avec la communication, ce lundi 14 mars, le milliardaire Elon Musk a défié Vladimir Poutine sur Twitter dans un combat d’homme à homme avec comme enjeu l’Ukraine, théâtre de multiples assauts de l’armée russe depuis le 24 février 2022. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’Elon Musk affiche son soutien à l’Ukraine et son engagement contre cette guerre (tweets de soutien, envoi de satellites Starlink afin d’aider les villes ukrainiennes qui n’ont plus accès à internet).

Mais quelle est donc la stratégie derrière cette communication pour le moins inattendue ? Quelles sont les raisons ? Et quel impact social media ce tweet a engendré ces derniers jours ?

Avec ses 78 millions de followers, le pouvoir d’influence du PDG de SpaceX est exceptionnel : la simple expression de son opinion lui permet d’obtenir un nombre d’impressions colossal. Après analyse de son tweet, on observe plus de 75k retweets, 370k likes et 38k commentaires. Des chiffres faramineux qui s’expliquent par des interactions régulières avec sa communauté : après avoir mentionné le Kremlin russe en commentaire et avoir répondu « sérieusement » à quelques réactions démontrant la véracité de sa volonté à confronter Vladimir Poutine, la toile s’est enflammée. Un pic atteignant les 8,1k mentions est observé entre 12h00 et 13h00, soit moins d’une heure après la publication du tweet initial et des réponses à sa communauté.

Résultats des mentions durant les 24h suivant le tweet organique d’Elon Musk

Les principaux médias et bon nombre d’influenceurs se sont empressés de reprendre la nouvelle, décuplant la visibilité de la publication et attirant la curiosité des internautes.

Le constat est clair, le « coup de comm’ » est réussi et le buzz est en marche. Malgré tout, l’histoire ne s’arrête pas là. Elon Musk a surenchéri dans la nuit du 14 au 15 mars en tweetant une photo que nous pourrions qualifier d’humoristique en réponse à Dmitri Rogozine, ancien Vice-Président du gouvernement russe.

Nous sommes entrés depuis quelques années dans l’ère du détournement et de la parodie. L’exemple d’Elon Musk en est la preuve la plus tangible : Il est l’un des premiers dirigeants de la tech à s’être transformé en icône médiatique et en avoir fait un modèle économique. Une telle stratégie suppose d’assumer de jouer avec la surprise, le dérapage, le politiquement incorrect, et à vivre de cela.

On se rappelle de ses tweets à propos du Bitcoin et du Dogecoin, destinés à gamifier le marché des cryptomonnaies et faire exploser les investissements.

Le sulfureux milliardaire sait manier le buzz et créer des contenus viraux (à l’image du mème « Baby Yoda » en 2019) mais peut parfois faire preuve d’un certain manque de discernement dans sa communication comme lorsqu’il a comparé le premier ministre canadien Justin Trudeau à Adolf Hitler durant la controverse sur les vaccins obligatoires qui touchait le pays (tweet supprimé par son auteur depuis).

Elon Musk ne déroge pas à ses habitudes. Coutumier des polémiques sur Twitter, c’est aussi pour ses frasques que les internautes l’apprécient… ou le détestent.

Mais quelle est donc l’idée du PDG de Tesla ? On peut donc imaginer qu’il s’agit d’un « troll » comme le laisse penser son passif sur le réseau et la majorité de sa communauté, qui le prend à la plaisanterie. Le natif sud-africain booste in fine sa notoriété et sa visibilité. Il peut manipuler des marchés entiers juste avec la force de ses réseaux sociaux, ce qui laisse penser que tout cela n’est qu’un divertissement pour lui. Cela dit, s’il s’agit là de divertissement simple, ce serait assez malvenu compte tenu de la situation en Ukraine … Il peut également s’agir d’un « coup de comm’ » destiné à le placer comme fervent soutien de l’Ukraine, à le mettre sur un piédestal et le définir comme un héros qui pourrait mettre fin à la guerre.

Elon Musk est un personnage controversé et difficile à cerner. Il est fort à parier que cet énième buzz se poursuive depuis la prise de position du chef de la république de Tchétchénie Ramzan Kadyrov qualifiant Elon Musk d’efféminé et le surnommant « Elona ». Surnom très vite repris et tourné à la dérision par le principal intéressé …

Par Benjamin Guerin, Consultant junior chez Antidox